Le Gouvernement à marche forcée veut concentrer les intercommunalités existantes, au moins en divisant par 3 leur nombre pour notre département comme il a divisé par 2 le nombre des Régions. C’est ainsi que la Lorraine est fusionnée avec deux autres régions sans trop savoir ni pourquoi faire et ni comment fonctionner.
A cet instant, je ne discuterai pas de la pertinence de ces réformes. La Loi « N.O.T.R.E » a été votée en août dernier, et il faudra attendre le grand débat des Présidentielles et des Législatives du Printemps 2017 pour envisager de garder ou d’adapter ce texte, voire de revenir au projet voté mais non-appliqué du Conseiller Territorial.
A court terme et pour juin 2016, le Préfet a mission de reconfigurer la carte des Interco Meusiennes par une mise en œuvre immédiate au 1er janvier 2017.
Dissipons une première erreur : le Préfet a le devoir de présenter un projet dans l’esprit de la Loi, mais son projet peut être modifié si une majorité des 2/3 des membres de la CDCI (Commission Départementale de la Coopération Intercommunale) le demande, et naturellement si ses demandes ne sont pas contraires à la Loi.
En Meuse, le statuquo est possible pour toute interco dépassant les 5 300 habitants environ. Commercy, bien que dépassant ce chiffre, est contrainte de fusionner pour des raisons complexes liées à la Loi : sa densité serait trop forte pour appliquer le seuil de 5300 !
Nos deux agglomérations de Bar le Duc et Verdun ont des visions différentes. En qualité de Sénateur, j’ai défendu l’amendement sénatorial qui a permis en 2010 de donner aux villes Préfectures, même petites, le statut d’agglomération. Bar le Duc en a profité. Pour Verdun, avec Claude LEONARD nous avons fait adopter l’amendement de 2013 qui permettait à Verdun –malgré sa taille – de bénéficier du même statut.
Je suis donc bien attaché aux rôles de ces deux agglomérations et à leurs réussites dans l’intérêt de la Meuse.
Je constate simplement que ces deux agglo ont deux stratégies différents : Verdun choisit l’approfondissement des mission de son agglo. Bar le Duc cherche à atteindre un chiffre d’habitants qui la fasse respecter vu depuis le siège régional de Strasbourg. Un peu plus de 30 000 pour l’une, près de 70 000 pour l’autre.
Chaque stratégie a ses avantages et ses inconvénients. Pour ma part, je suis attaché à la volonté de coopération qu’exprime les élus de base que sont les maires, regroupés dans des interco, surement imparfaites, mais qui ont fait leurs preuves et qui savent évoluer.
En un mot, la CDCI doit tenir compte des volontés exprimées des élus et lorsque la Loie garde le choix possible. Elle doit respecter ce choix des élus qui sont quotidiennement en charge de la vie de leurs citoyens.
Des tendances lourdes se dégagent : le Nord Meusien hésite entre un regroupement à 5 intercos et un système plus proche de l’actuel. L’Argonne est obligée de fusionner pour ce qui est de ses interco de l’Arrondissement de Verdun. Verdun en veut pas s’étendre pour l’instant, même si Etain aujourd’hui est plus ouverte à un rapprochement que ne le sont les deux interco de Souilly et Val de Meuse décidées à travailler ensemble mais sans chef-lieu d’arrondissement.
Fresnes, de par la Loi, peut rester autonome mais regarde ce qui se passe autour d’elle, c’est une interco confirmée qui a fait ses preuves.
Au Centre de la Meuse, un regroupement se construit : si Vigneulles et Saint Mihiel restent séparées, « Entre Aire et Meuse » et Vaubécout/Triaucourt fusionnent par nécéssité législative mais aussi par identités des problèmes. Ensemble ces trois interco envisageraient volontiers un PETR commun, ouvert sur la Meurthe et Moselle et un jour sur Fresnes.
Certes, Bar le Duc verrait partir l’Argonne du Sud avec regrets, mais l’agglo envisage de s’ouvrir sur Revigny et le Sud de l’Arrondissement, soit Ancerville et Montiers et même Gondrecourt compris, arraché à l’Arrondissement de Commercy.
Sans doute, ne s’agit-il à cet instant que d’un projet, voulu par le chef-lieu Bar Le Duc car si une coopération est souhaitée par tous, bien des préalables restent posés, et notamment l’impact fiscal, surtout lorsque le Gouvernement annonce une réforme de la DGF inquiétante. Seul Vaucouleurs resterait tel qu’aujourd’hui, sachant que le Préfet, adossé à la Loi, veut fusionner Void et Commercy.
En un mot, si les bonnes volontés de coopération ne manquent pas, bien des élus sont à juste titre inquiets pour deux raisons :
– Quelle fiscalité pour leurs habitants et quels services en contre partie
– Quelle règle de gouvernance entre le risque de dispersion et celui de domination.
La complexité n’interdit pas le mouvement. Mais la précipitation peut créer des dégâts irréversibles. Autre question majeure : à quoi servira demain le département ? Pourra-t-il toujours aider les interco ? La Région sera-t-elle suffisamment proche ? Par exemple comment gérer les transports scolaires depuis Strasbourg ?
J’aimerais qu’un ordre logique soit respecté :
1 – D’abord attendre les élections régionales pour savoir quelle politique territoriale sera organisée par le nouvel exécutif, et par conséquent quels seront les liens entre Région, Départements et agglomérations
2 – Puis le vote par le Parlement de la nouvelle DGF au printemps prochain
3 – Enfin la carte définitive des Interco pour savoir vers quelle organisation territoriale la France, le Grand Est, la Meuse doivent s’orienter.
Il est vrai que le bon sens ne préside plus au choix des stratégies, mais plutôt la volonté d’afficher des réformes sans objectifs clairs et accessibles à tous.
Je ne comprends toujours pas ce que veut le Gouvernement qui impose aux collectivités ce qu’il n’impose pas à ses services. Ainsi, il y aura toujours autant de Préfectures ou de Rectorats. Tant mieux pour nous qui connaissons et apprécions ces services. Mais pourquoi faire disparaître ce qui existe et qui marche comme les départements en territoires ruraux, ou les intercos de proximité quand les petites villes ne sont pas en mesure de prendre tous les relais.
Pour nous élus meusiens notre devoir est de se parler, d’échanger, de proposer pour construire ensemble dans le long terme un développement équilibré qui respecte la singularité d’un territoire, certes dispersé entre ses villes principales, ses villes relais et ses villages nombreux mais vivants et capables de projets ambitieux. Nous l’avons prouvé, de la Gare TGV à Cigéo, en passant par SAFRAN, au maintien de nos deux régiments ou à la montée en puissance d’une agriculture renouvelée. Avec la présence profitable des métropoles que sont pour nous Luxembourg, Metz ou Nancy, la Meuse a su se rassembler pour agir, malgré sa faible densité et tous les inconvénients et singularités qui en découlent. Aussi la précipitation n’est pas bonne conseillère et notre territoire doit être réorganisé avec sagesse, dialogue et respect du travail accompli.