Le premier bénéfice de la primaire de la Droite et du Centre est qu’enfin nos candidats écrivent leur programme et leurs analyses. Les éditorialistes devraient se réjouir de cette production. Ce matin, au contraire, ils s’en désolent. La critique est la même, comme une sorte de vague qui submergerait tous ces laborieux et pourtant bien utiles efforts : le conformisme, le manque de souffle, l’absence de vision à long terme caractériseraient ces productions. Et la rumeur va même jusqu’à se nourrir des propos du Président du Medef devenu une référence pour la Presse. Il déclare serein : « nos entreprises ont des projets à moyen et à long terme. » Sous-entendu : « Ces programmes n’en ont pas ».
Au Président du Medef, je réponds d’abord que si je suis patriote et libéral, la France n’est pas une entreprise. Aussi grande soit-elle, une entreprise n’a pas à gérer la complexité d’un pays, première différence. Ensuite elles sont propriétés d’actionnaires qui, au travers de leurs dirigeants, ont le devoir de donner des ordres qui s’imposeront à l’entreprise dans le cadre des lois marchés malgré tout. Heureusement, le pouvoir politique n’a ni cette légitimité simple fondée sur la propriété – la monarchie a été abolie une première fois en France juste avant Valmy – ni le rôle de dire aux Français comment ils doivent vivre. Sinon la République serait totalitaire.
Je ne demande au pouvoir politique qu’une seule chose : garantir à notre pays le degré d’indépendance le plus fort possible pour que nous ayons, nous les citoyens, le plus de liberté possible dans nos choix. Certes, cela suppose une stratégie dans un monde ouvert. Mais de grâce ni mes revenus, ni mon travail, ni ma formation ne doivent être définis par le pouvoir politique, utilisant son outil, l’Etat.
Je veux simplement, et c’est une tâche déjà immense, qu’il ne nous interdise pas de réussir en choisissant nous-même notre chemin, au nom d’objectifs politiques parfois aussi discutables qu’incertains. Les risques principaux dans le monde sont connus : une démographie mondiale inégale et parfois délirante, des matières premières mal réparties, donnant à certains pays plus de poids politique qu’ils n’en peuvent, une grande puissance – les Etats Unis – qui paraît souvent désinvolte au regard du respect des autres nations, une Europe éprise de perfections mais dénuée de réalisme. Voilà quelques données de notre environnement international. Il faut faire avec et le Président doit nous aider à trouver notre chemin.
Mais je demande à mon candidat d’avoir le souci de la liberté de mon pays sans qu’il confisque la mienne. Pour le reste, nous savons individuellement ou associés construire, investir, équiper, animer, soigner, protéger ou aimer sans attendre la profession de foi des candidats à la Présidence, dont je souhaite qu’il préside les institutions publiques sans me diriger personnellement. Cela est déjà considérable et depuis longtemps rarement atteint.
Alors réjouissons nous que ces programmes semblent tous renoncer au « Tout Etat ». C’est déjà une belle résolution et un premier succès pour François Fillon qui, comme candidat a donné le ton, désormais largement suivi.