21 novembre, 2024

Mise en œuvre de la contractualisation

La loi de finances pour 2018 et la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ont été publiées respectivement le 31 décembre 2017 et le 23 janvier 2018.
Concernant la contractualisation, 340 collectivités sont concernées. Le critère retenu n’a pas été celui de la taille en nombre d’habitants, mais celui du montant du budget de fonctionnement : sont ainsi concernées les communes et EPCI dont les dépenses réelles de fonctionnement en 2016 sont supérieures à 60 millions d’euros, ainsi que l’ensemble des départements et des régions, mais aussi la Corse, la Martinique, la Guyane et la métropole de Lyon. Ces 340 collectivités représentent environ les trois quarts des dépenses réelles de fonctionnement des administrations publiques locales.
Il est important de noter que les collectivités locales n’entrant pas dans le périmètre de la contractualisation peuvent prendre part de manière volontaire au processus de contractualisation avec l’État.
L’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales retenu par le Gouvernement, afin de réaliser 13 milliards d’euros d’économies sur 5 ans, est +1,2% par an en valeur, comme dans le texte initial. La modification apportée par le Sénat et les observations de sa commission des finances n’ont pas été retenues : 1,2 % était fixé par rapport à une évolution tendancielle des dépenses des collectivités sous-estimée ; en réalité, la trajectoire prévue par la loi de programmation des finances publiques représente un effort pour les collectivités territoriales de l’ordre de 21 milliards d’euros et non de 13 milliards d’euros. L’objectif d’une baisse de 13 milliards d’euros des dépenses des collectivités territoriales sur le fondement d’hypothèses d’évolution tendancielle de la dépense locale plus sincères avait conduit la commission des finances du Sénat à fixer l’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales à +1,9% par an en valeur au lieu de +1,2%.
Par ailleurs, il est important de préciser que l’objectif de 1,2 % inclut l’inflation et le glissement vieillesse technicité (GVT), qui peuvent absorber à eux seuls la totalité de la progression des dépenses locales. Les sénateurs LR ont dénoncé cette intégration des dépenses exogènes aux collectivités territoriales dans le plafond d’évolution des dépenses.
1,2 % peut être revu à la baisse ou à la hausse pour chaque collectivité territoriale qui contractualise en fonction de trois critères (jusqu’à +/- 0,15 point par critère) : l’évolution démographique de 2013 à 2018 ou le nombre de logement autorisés, le revenu moyen par habitant ou la proportion de population résidant en quartiers prioritaires de la politique de la ville et l’évolution des dépenses de fonctionnement de 2014 à 2016.
La prise en compte de la démographie et des efforts déjà réalisés (premier et troisième critères) a été proposée par le Sénat et a été retenue par le Gouvernement. La prise en compte des nouvelles normes imposées par l’Etat, qui a aussi été proposée par le Sénat, n’a pas été retenue par le Gouvernement, ce qui était pourtant essentiel. Le Gouvernement a simplement précisé qu’il dresserait un bilan de l’application de la contractualisation avant le débat d’orientation des finances publiques du projet de loi de finances pour 2020, qui tiendrait compte du rapport public annuel du Conseil national d’évaluation des normes.
Il est à noter que cette modulation de l’objectif en fonction de ces trois critères n’est pas automatique et 0,15 point est un maximum ; elle fera partie de la négociation contractuelle avec le préfet, en fonction des précisions apportées par la direction générale des collectivités territoriales (DGCL). Cette dernière doit au plus vite apporter les informations aux collectivités concernées. En effet, le contrat, qui portera sur les années 2018, 2019 et 2020 (contrats triennaux), doit être signé au cours du premier semestre 2018, mais les budgets communaux doivent être votés au premier trimestre au plus tard. Il est indispensable que les maires concernés aient connaissance rapidement des détails du contrat, afin d’avoir le temps d’intégrer les efforts demandés dans la préparation de leur budget, le contrat prenant effet en 2019 sur la base des comptes de gestion 2018.
En cas de non-respect du contrat, la sanction financière retenue par le Gouvernement a été la fourchette haute proposée par la mission de préfiguration du pacte financier Etat-collectivités : en cas de dépassement de l’objectif contractuel d’évolution des dépenses de fonctionnement, la différence sera reprise à hauteur de 75 % du montant des dépenses supplémentaires, par une baisse des concours de l’Etat. Les collectivités territoriales concernées par la contractualisation mais qui refusent de signer se verront pour leur part reprises à 100 % en cas d’écart.
La commission des finances du Sénat avait précisé que le montant de la sanction ne pouvait être égal à l’écart par rapport à l’objectif d’évolution des dépenses : le mécanisme de correction n’a en effet pas vocation à devenir une baisse des dotations « déguisée ».
Toutefois, la proposition du Sénat d’un plafonnement de la sanction a été reprise : son montant est limité à 2 % maximum des recettes de fonctionnement de la collectivité.
Le bonus est pour sa part beaucoup moins détaillé. Il est juste précisé qu’en cas de respect des objectifs contractuels, le préfet pourra accorder aux communes et EPCI signataires « une majoration du taux de subvention pour les opérations bénéficiant de la dotation de soutien à l’investissement local » (DSIL). Mais le Gouvernement n’a pas apporté de précisions quant au pourcentage de majoration. De surcroît, comment apporter une bonification de pourcentage sur la DSIL, alors que les résultats chiffrés de l’évolution des dépenses de la commune seront connus après la prise de décision sur la DSIL ? Un constat s’impose : si le malus est précis, le bonus demeure flou… Les sénateurs LR ont dénoncé le caractère léonin de cette contractualisation.
L’avancée la plus notable est la prise en compte de la suppression par le Sénat de la « règle d’or renforcée », à savoir le contrôle de la capacité de désendettement des collectivités territoriales : cet objectif devient incitatif et non plus contraignant.
Cette nouvelle règle basée sur la capacité de désendettement faisait en effet peser le risque d’une réelle tutelle de l’Etat sur le recours à l’emprunt avec des conséquences réelles possibles sur l’investissement public local.