Lundi 11 juillet 2016, le Sénat a adopté en nouvelle lecture le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Je suis intervenu pour l’explication de vote de l’amendement n°14
L’amendement n° 14, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Appui technique et expertise aux services de l’État, aux collectivités et aux établissements publics chargés de la gestion de l’eau, de la biodiversité et des espaces naturels pour l’évaluation et la prévention des dommages causés aux activités agricoles, pastorales et forestières par les espèces protégées ;
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Les dégâts occasionnés par certaines espèces protégées causent des pertes financières considérables pour les activités agricoles, pastorales et forestières, que nous savons en grande difficulté.
Si la conservation de ces espèces est nécessaire et conforme à nos engagements européens et internationaux, il n’en demeure pas moins que cette réglementation pose des problèmes sur le terrain.
Au lieu de pénaliser les activités humaines, accompagnons-les dans l’évaluation et la prévention des dommages en amont.
C’est pourquoi il convient de donner à l’Agence française pour la biodiversité un rôle d’appui technique et d’expertise en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Sagesse, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État. Cet amendement vise à rétablir la mission de l’Agence française pour la biodiversité relative à l’évaluation et à la prévention des dommages causés par les espèces protégées, qui avait déjà été introduite par le Sénat.
Le Gouvernement considère, de manière constante, qu’un tel ajout n’est pas pertinent. Cela demande en effet, j’y insiste, des compétences étrangères au domaine de la biodiversité, dont l’agence ne disposera pas. Si l’agence devait les acquérir, il en résulterait des dépenses beaucoup trop élevées.
Je suis donc défavorable à l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je suis élu d’un département où le loup a refait son apparition, en causant des dégâts permanents et en déstabilisant les éleveurs, notamment ceux de moutons, qui ont du mal à comprendre la priorité accordée à cet animal, au fond assez antipathique et sanguinaire dans ses méthodes. C’est pourquoi je soutiens cet amendement, non pour trouver une solution, mais afin d’exprimer ma préférence pour ceux qui produisent et vivent de la terre, et non pas pour ceux qui en parlent et la regardent de loin…
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État. Je souhaite répondre sur ce point, car on ne doit pas tout mélanger.
La semaine dernière, j’ai réuni, au Muséum national d’histoire naturelle, tous les acteurs concernés par cette question du loup, qui pose effectivement un grand nombre de difficultés et dont, aujourd’hui, nous pouvons tous regretter que la gestion se fasse au coup par coup. On décide, d’un côté, des arrêtés de tir, de l’autre, des mesures de protection, mais sans perspective de long terme.
Et je peux vous dire, monsieur Longuet, que cette opération est en cours. Il s’agit d’abord – mais pas seulement – d’un travail d’expertise. Il est mené par l’ONCFS et le Muséum, de concert et sur un champ très large. Où trouve-t-on le loup ? Quelles sont ses zones de vie, ses comportements et interactions avec son milieu ? Les mesures qui ont été prises sont-elles efficaces ou non ?
À partir de cette expertise, les scientifiques, ainsi que les représentants des éleveurs, des associations et des élus vont se réunir pour essayer d’élaborer une stratégie de long terme, qui ne se résume pas à du coup par coup.
Je suis heureuse de voir que tous les acteurs, qui ont parfois des difficultés à se parler, se sont retrouvés autour de la table et veulent travailler ensemble.
Vous le voyez, tout cela n’a rien à voir avec une compétence qui serait donnée à l’Agence française pour la biodiversité. Je le redis, l’agence ne pourrait d’ailleurs pas exercer cette compétence.
Le travail est en cours et, encore une fois, je suis très satisfaite de voir que tous les acteurs veulent, de manière constructive, arriver à des solutions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Il n’y a pas que le loup… Les espèces protégées sont beaucoup plus nombreuses que cela et je ne voudrais pas qu’on en oublie.
Selon vous, madame la secrétaire d’État, si l’on donne cette compétence à l’agence, il faudrait élargir ses moyens, ce qui ne serait pas possible d’un point de vue budgétaire, voire en termes d’expertise. Parallèlement, vous dites que des procédures sont engagées en la matière.
Dans ces conditions, pourquoi ne pas donner à l’agence la possibilité de coordonner ces travaux ? Vous dites que vous ne souhaitez pas travailler au coup par coup. Donner à l’agence la possibilité de coordonner cela, sans moyens supplémentaires, validerait justement le rôle éminent de l’agence et renforcerait son autorité.
Aussi, je voterai l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 14.
(L’amendement est adopté.)
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